8 novembre 2020

Les caricatures ne sont pas des icônes

 Les caricatures ne sont pas des icônes ou pour reprendre la formule d'un courrier de lecteur de Ouest France ( 4 novembre 2020) " La laïcité ne doit pas être une autre religion, dont le dogme principal serait d'adhérer avec vénération à un courant de pensée dominant, tandis qu'une contestation réfléchie serait présentée comme dissidente ou déviante". L'affichage sur les hôtels de région de Toulouse et de Montpellier des caricatures publiées dans Charlie Hebdo me semble aller à l'encontre du but poursuivi. La liberté d'expression c'est aussi de pouvoir engager le débat sur ces questions, d'accepter le diversité des points, de tenir compte de la sensibilité des uns et des autres. En responsabilité et pas uniquement en conviction. 

Dans cette même page des lecteurs ( OF 4.11.20) une personne athée, engagée,  ne veut pas ressentir la liberté d'expression comme la liberté de dégrader " La liberté d'expression n'est pas l'humiliation" et s'étonne que dans notre beau pays  pour faire comprendre la liberté d'expression à des enfants on leur montre des images humiliantes, vulgaires ou obscènes. Des images auxquelles les adultes n'accèdent que s'ils font le choix de se les procurer. 

La publication par solidarité et affirmation des "valeurs"  de la république,  des caricatures de Mahomet dans de très nombreux journaux n'est pas positive sur ce plan. C'est une forme de bonne conscience, de " On est pour ou on est contre, point!" . Ce n'était pas la démarche de Samuel Paty. Au contraire le débat doit être ouvert. Comme l'a indiqué le président du Conseil du Culte Musulman ( CFCM) " Ces caricatures ne sont pas et ne doivent être  le seul support pédagogique pour illustrer la liberté d'expression." . On ne peut exiger d'une manière abrupte de quelqu'un qu'il se montre tolérant explique François Saint-Bonnet, professeur de droit à Panthéon-Assas,  dans la rubrique Débat de La Croix (29.10.20). "La tolérance est en effet une valeur, mais surtout une expérience...On n'aborde pas de but en blanc les sujets qui nous séparent les uns des autres ( Dieu, la morale, la politique, l'intime, etc)....Il faut accepter l'altérité, c'est à dire que certains rient de quelque chose dont soi-même on ne rit pas, mais aussi entrer dans le second degré" . La caricature n'est pas facile à partager. Avec des jeunes de 13 ans il faut le faire avec " une grande délicatesse". Comme l'indique dans le même Débat, un  professeur de collège Seine -Saint-Denis, Iannis Roder " Un cours doit être construit, réfléchi : il ne se réduit pas à des raccourcis, des emblèmes ou des slogans réclamant l'adhésion" Sans asséner ce qui pourrait être assimilé à une vérité, il s'agit de faire comprendre le fonctionnement et les ressorts de la liberté d'expression.

Libellés : , , , , , , , ,