Johanna Rolland que j'ai connue à Vertou
Intéressante - et très longue - interview de Johanna Roland par Eric Chalmel ( dessinateur dans PO sous le nom de FRAPsur le blog etatsetempiredelalune.blogspot.com
Interview reprise sur le compte Facebook de Cecile Petident
Commentaire perso : c'est bien ainsi que je connais la famille de Johanna Rolland, son père toujours passionné de politique quand on se rencontre sur le marché, et sa mère, décédée depuis plusieurs années, qui était unanimement appréciée.
Extraits
Où êtes vous née ?
J.R. - Je suis née à Nantes mais j’ai grandi à Vertou. Mon père est nantais, il habitait au Vieux Doulon. Mes grands-parents étaient de là-bas. Il y a quelque temps je suis allée aux cinquante ans de la Saint-Médard de Doulon et je me suis retrouvée avec des gens qui avaient connu mon grand-père. C’était étonnant. Ils m’en ont parlé alors que je ne l’ai quasiment pas connu, j’avais trois ans lorsqu’il est décédé. C’était quelqu’un de très engagé.
Engagé politiquement ?
Pas politiquement. Il était engagé dans les associations, à la Saint-Vincent-de-Paul.
Le patronage de l’époque ?
En quelque sorte. Avec un fils anticlérical, mon père, comme souvent dans les familles chrétiennes ! Ma mère, elle, était de Vertou. C’est là que j’ai grandi, où je suis allée au collège Jean Monnet. Ensuite seulement à Nantes, aux Bourdonnières – certains amis de mes parents se méfiaient des Bourdonnières, ils disaient qu’il fallait faire attention… - puis à Guist’Hau pour faire une prépa littéraire. Donc je suis née à Nantes mais j’ai grandi dans l’agglomération. Dans mes souvenirs d’enfant, Nantes c’était un peu une destination extraordinaire, où j’allais voir mes cousines…
Vous montiez à la ville…
On allait à la Nantes pour la foire, pour le carnaval, il y avait un côté fête et puis après, adolescente, les premières expériences d’autonomie, de liberté, les premières découvertes…
C’était les années 80 ?
Oui, 80-90.
Pourquoi ai-je dans la tête que vous veniez du Creusot ? C’est idiot.
Non, j’ai travaillé au Creusot…En fait, quand j’étais en prépa, hypokhâgne, le prof avait décidé que j’allais passer en Normale Sup. On s’est fâché quand j’ai dit que je voulais faire Sciences Po. Pour lui, dans la vie on était agrégé de philosophie ou de littérature et rien n’existait en dehors de ça. J’ai adoré ces deux années, ce bouillonnement intellectuel… Jamais je n’ai eu l’impression que mon cerveau marchait aussi vite que ces années-là ! Mais à l’inverse j’ai détesté l’élitisme et tout ce qui va avec. J’ai vu des jeunes de dix-neuf ou vingt ans, intelligents mais cassés par le système de la prépa. Et j’ai tout autant détesté le snobisme intellectuel qu’on y trouvait parfois, genre tu ne lis que Le Monde, Télérama, tu écoutes forcément France Inter…
Évidemment… C’est dur.
Ça a un côté très caricatural. Je pense que j’ai eu la chance d’avoir à ce moment-là une vie en dehors de tout ça, des parents qui ne m’avaient pas poussée à faire ça.
« Chez moi, ça parlait politique tout le temps.
J’ai baigné dedans. »
Que faisaient vos parents, si ce n’est pas indiscret ?
Non, lorsque j’étais enfant mon père était employé de banque, à la Société générale. Syndicaliste à la CFDT, anticlérical, plutôt ce qu’on appelle une grande gueule… Et qui a toujours voté PS.
C’est ici qu’on commence la politique…
Chez moi, ça parlait politique tout le temps. J’ai baigné dedans. Ils faisaient partie de ces gens chez qui il est difficile de comprendre que tu peux voter autre chose que PS, ce qui nous a valu quelques débats. Et puis mon père a quitté la Générale lors des grandes grèves de 93. Il y a eu beaucoup de licenciements. Lui s’est porté volontaire pour partir. Il a pris un vrai risque. Il est parti après avoir fini la grève, il était le porte-parole des grévistes. C’est inscrit dans mes souvenirs d’enfance. J’ai vu ses amis syndicalistes préparer les chansons, les manifs, jusqu’à cinq heures du matin… Puis il est parti et a repris ses études. C’est une expérience qui m’a marquée, ça n’a pas été évident pour lui de reprendre des études jusqu’à bac +5, je suis très admirative. Ensuite il a monté sa boîte de consultant.
Et votre mère ?
Ma mère était institutrice dans le privé. Chrétienne. Ce qui avec un père syndicaliste très anticlérical a donné quelques débats assez vifs !
Cela peut être très érotique, comme mélange…
Aussi… Mais c’est vrai que de ce point de vue, j’ai grandi dans une famille qui ressemble finalement assez à l’Ouest, entre tradition chrétienne et engagement à gauche. Ma mère était chrétienne, mais pas une catholique pratiquante. Pour elle, être chrétienne cela voulait dire quelque chose, dans la vie de tous les jours.
On peut penser que les sociaux-démocrates de l’Ouest sont les héritiers des démocrates-chrétiens, non ? En fait, c’est le même mouvement. Les démocrates-chrétiens ont plus ou moins disparu et les sociaux-démocrates ont récupéré l’affaire.
Oui, bien sûr. Disons que j’ai grandi dans une famille où le rapport aux autres était très déterminant.
Revenons à vos études.
Quand j’ai fini ma prépa, j’ai passé le concours de Sciences Po, comme je l’avais décidé. J’ai eu Lille où je suis partie deux ans. J’ai beaucoup appris, sur les bancs des amphis mais en dehors aussi. Ça a été mes premières expériences de militantisme.
Quel a été le déclencheur ?
L’école a été envahie par le collectif des sans-papiers
Interview reprise sur le compte Facebook de Cecile Petident
Commentaire perso : c'est bien ainsi que je connais la famille de Johanna Rolland, son père toujours passionné de politique quand on se rencontre sur le marché, et sa mère, décédée depuis plusieurs années, qui était unanimement appréciée.
Extraits
Où êtes vous née ?
J.R. - Je suis née à Nantes mais j’ai grandi à Vertou. Mon père est nantais, il habitait au Vieux Doulon. Mes grands-parents étaient de là-bas. Il y a quelque temps je suis allée aux cinquante ans de la Saint-Médard de Doulon et je me suis retrouvée avec des gens qui avaient connu mon grand-père. C’était étonnant. Ils m’en ont parlé alors que je ne l’ai quasiment pas connu, j’avais trois ans lorsqu’il est décédé. C’était quelqu’un de très engagé.
Engagé politiquement ?
Pas politiquement. Il était engagé dans les associations, à la Saint-Vincent-de-Paul.
Le patronage de l’époque ?
En quelque sorte. Avec un fils anticlérical, mon père, comme souvent dans les familles chrétiennes ! Ma mère, elle, était de Vertou. C’est là que j’ai grandi, où je suis allée au collège Jean Monnet. Ensuite seulement à Nantes, aux Bourdonnières – certains amis de mes parents se méfiaient des Bourdonnières, ils disaient qu’il fallait faire attention… - puis à Guist’Hau pour faire une prépa littéraire. Donc je suis née à Nantes mais j’ai grandi dans l’agglomération. Dans mes souvenirs d’enfant, Nantes c’était un peu une destination extraordinaire, où j’allais voir mes cousines…
Vous montiez à la ville…
On allait à la Nantes pour la foire, pour le carnaval, il y avait un côté fête et puis après, adolescente, les premières expériences d’autonomie, de liberté, les premières découvertes…
C’était les années 80 ?
Oui, 80-90.
Pourquoi ai-je dans la tête que vous veniez du Creusot ? C’est idiot.
Non, j’ai travaillé au Creusot…En fait, quand j’étais en prépa, hypokhâgne, le prof avait décidé que j’allais passer en Normale Sup. On s’est fâché quand j’ai dit que je voulais faire Sciences Po. Pour lui, dans la vie on était agrégé de philosophie ou de littérature et rien n’existait en dehors de ça. J’ai adoré ces deux années, ce bouillonnement intellectuel… Jamais je n’ai eu l’impression que mon cerveau marchait aussi vite que ces années-là ! Mais à l’inverse j’ai détesté l’élitisme et tout ce qui va avec. J’ai vu des jeunes de dix-neuf ou vingt ans, intelligents mais cassés par le système de la prépa. Et j’ai tout autant détesté le snobisme intellectuel qu’on y trouvait parfois, genre tu ne lis que Le Monde, Télérama, tu écoutes forcément France Inter…
Évidemment… C’est dur.
Ça a un côté très caricatural. Je pense que j’ai eu la chance d’avoir à ce moment-là une vie en dehors de tout ça, des parents qui ne m’avaient pas poussée à faire ça.
« Chez moi, ça parlait politique tout le temps.
J’ai baigné dedans. »
Que faisaient vos parents, si ce n’est pas indiscret ?
Non, lorsque j’étais enfant mon père était employé de banque, à la Société générale. Syndicaliste à la CFDT, anticlérical, plutôt ce qu’on appelle une grande gueule… Et qui a toujours voté PS.
C’est ici qu’on commence la politique…
Chez moi, ça parlait politique tout le temps. J’ai baigné dedans. Ils faisaient partie de ces gens chez qui il est difficile de comprendre que tu peux voter autre chose que PS, ce qui nous a valu quelques débats. Et puis mon père a quitté la Générale lors des grandes grèves de 93. Il y a eu beaucoup de licenciements. Lui s’est porté volontaire pour partir. Il a pris un vrai risque. Il est parti après avoir fini la grève, il était le porte-parole des grévistes. C’est inscrit dans mes souvenirs d’enfance. J’ai vu ses amis syndicalistes préparer les chansons, les manifs, jusqu’à cinq heures du matin… Puis il est parti et a repris ses études. C’est une expérience qui m’a marquée, ça n’a pas été évident pour lui de reprendre des études jusqu’à bac +5, je suis très admirative. Ensuite il a monté sa boîte de consultant.
Et votre mère ?
Ma mère était institutrice dans le privé. Chrétienne. Ce qui avec un père syndicaliste très anticlérical a donné quelques débats assez vifs !
Cela peut être très érotique, comme mélange…
Aussi… Mais c’est vrai que de ce point de vue, j’ai grandi dans une famille qui ressemble finalement assez à l’Ouest, entre tradition chrétienne et engagement à gauche. Ma mère était chrétienne, mais pas une catholique pratiquante. Pour elle, être chrétienne cela voulait dire quelque chose, dans la vie de tous les jours.
On peut penser que les sociaux-démocrates de l’Ouest sont les héritiers des démocrates-chrétiens, non ? En fait, c’est le même mouvement. Les démocrates-chrétiens ont plus ou moins disparu et les sociaux-démocrates ont récupéré l’affaire.
Oui, bien sûr. Disons que j’ai grandi dans une famille où le rapport aux autres était très déterminant.
Revenons à vos études.
Quand j’ai fini ma prépa, j’ai passé le concours de Sciences Po, comme je l’avais décidé. J’ai eu Lille où je suis partie deux ans. J’ai beaucoup appris, sur les bancs des amphis mais en dehors aussi. Ça a été mes premières expériences de militantisme.
Quel a été le déclencheur ?
L’école a été envahie par le collectif des sans-papiers
Libellés : Cecile Petident, Eric Chalmel, FRAP, Johanna Rolland, PS, Vertou
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