Télescopage de Une et engagement journalistique

En l’espace de quelques jours le dernier week-end, au moins trois – voire quatre – informations méritaient de faire la Une de l’actualité. L’accord conclu entre 3 syndicats sur 5 et le patronat a été le premier évènement de grande portée et très positif pour la méthode préconisée par François Hollande. Le déclenchement de l’intervention militaire française au Mali pour empêcher la descente des djiadhistes vers Bamako, est aussi un évènement politique de 1er plan, qui nous engage (pour combien de temps ?). En même temps, l’échec de l’exfiltration de notre otage en Somalie, aurait valu en d’autres circonstances la Une de la presse pendant plusieurs jours. Enfin dimanche la manifestation contre le projet de mariage homosexuel a manifestement été l’une des plus importantes depuis plusieurs décennies. Elle a souffert sur le plan médiatique d’être prise en sandwich entre les évènements militaires. Ce qui certainement n’a pas déplu à François Hollande qui pouvait être frustré du peu d’échos donné à l’accord social de flexsécurité de vendredi. Il a trouvé beaucoup d’alliés dans les médias d’Etat pour réduire la portée de cette manifestation politiquement incorrecte. Médias d’Etat qui en ont profité pour minorer en temps et en contenu cette opposition du « peuple en mouvement » pour reprendre l’expression d’Edwy Plenel ! Etant auditeur des matinales de France Culture, je pense au journal de 8 h. de la très militante Amélie Perrier(1) qui a relégué en fin de journal ce sujet « consistant » reprenant aussi l’antienne gouvernementale « Ca ne changera rien ». Circulez ya rien à voir !
Autre exemple, le journal de 20 h dimanche soir sur France 2 qui pour illustrer la composition de la manifestation à travers plusieurs interviews, nous présente un jeune prêtre évidemment en soutane, ce qui à la fois dans sa corporation et à fortiori dans la manifestation d’après les témoins, était ultra ultra minoritaire. Mais ça fait sans doute plaisir au journaliste qui fait le sujet et à son rédacteur en chef.
Connivence et/ou manque de courage des journalistes dans l’appréciation du nombre de manifestants. Entre les 340 000 de la police et les 800 000 des organisateurs, quel journaliste a eu le courage de dire son appréciation ?. Pour une fois Libération reprend les chiffres de la police ! C’est pourtant leur boulot ! Je suis convaincu que si une manifestation d’une telle ampleur avait eu lieu l’an dernier contre un projet de Sarkozy, c’aurait été un déchaînement. Il suffit de reprendre les titres à ce moment là…
La complaisance ou la connivence des grands médias d’Etat à l’égard du nouveau pouvoir, me fait penser à la phrase de Pierre Bouteiller à propos de l’ORTF et la consigne prêtée aux journalistes : « Un sujet, un verbe, un compliment ».
(1) Avec Hubert Huertas et Ludovic Piedtenu : une vraie section PS !