Julia Cagé, la presse et Jean-Paul Sartre
Julia Cagé , jeune ( 31 ans), provinciale
d’origine, normalienne, diplômé de Harvard, partage avec sa sœur jumelle un
parcours remarquable de grandes écoles . Professeur d’économie à Sciences Po,
elle nous a fait part dans la
présentation de son itinéraire, de sa vocation d’étudiante « Je
voulais être Jean-Paul Sartre ! ». Pour le talent et pour la liberté. Elle veut sauver la presse, en s'en donnant les moyens. Elle est par ailleurs depuis 2014, mariée à Thomas Piketty.
La liberté et la démocratie, la défense de le
l’information comme bien public, c’est ce qui a motivé sa démarche dans le
livre très remarqué qu’elle a publié en janvier 2015 « Sauver les médias, Capitalisme, financement participatif et
démocratie ».
Avec beaucoup d’enthousiasme, de passion et de
simplicité, Julia Cagé, a fait une présentation, à la fois du diagnostic
national et international de l’information, du journalisme et des entreprises
de presse, marqués par « La fin
des illusions » et de ses propositions d’un nouveau modèle pour le XXIè
siècle. C’est notamment la proposition de créer un nouveau type d’entreprise de
presse, la « Société de média à but
non lucratif » qui a fait l’objet de nombreux commentaires dans le
milieu de la presse lors de la parution.
A la question de Jacques Gagneur « Si le gouvernement vous confiait demain une mission de six mois pour résoudre
la crise de la presse, que proposeriez-vous ? »
La réponse instantanée et structurée fuse
immédiatement :
1/ En
premier lieu, je ferai respecter la loi
sur la concurrence, et les règles qu’elle impose
2/ Ensuite
je m'attacherai à l'indépendance des
journalistes, par une charte professionnelle et l’autorité du CSA
3/ Après, il
faudra prendre des mesures qui garantissent la transparence quant à la propriété des médias
4/ Enfin, il
s'agira de créer un statut de Société de
médias, le statut de « société de média à but non lucratif »
intermédiaire entre le statut de fondation et celui de société par actions.
Elle relève dans le paysage français de la presse
d’information, des modes d’organisation
liés à une histoire spécifique, qui garantissent l’indépendance (Ouest France,
Canard Enchaîné, La Croix, Médiapart) et les particularités de la revue XXI.
Ayant participé la veille, au déménagement de Libération, Julia Cagé montre
comment Patrick Drahi en a fait l’acquisition comme levier d’influence et de
pression sur l’Etat.
Elle évoque le système d’aide à la presse beaucoup trop
complexe où le poids de l’Etat est
excessif. Il est urgent de repenser les lois qui encadrent le pluralisme des
médias, et les lois anti-concentration sont datées (On ne connaissait pas
Internet à l’époque).
A l’exemple des Etats-Unis, Julia Cagé montre que
la crise est sévère : il y a de moins en moins de journalistes par
journal, un journaliste titulaire du prix Pulitzer peut être licencié du jour
au lendemain pour des motifs économiques. Les journalistes sont guettés par les
conflits d’intérêts, l’autocensure. La concentration des médias est
anti-démocratique. Aux Etats-Unis, la démocratie est « achetée » par
les plus fortunés : 0,1% de la population financent 40% des campagnes
présidentielles.
A ses yeux, la pluralité et la qualité de
l’information ne peut être assurée s’il y a de moins en moins de groupes
indépendants des grands industriels. Julia Cagé veut s’engager pour le
pluralisme des médias.
Libellés : Jean-Paul Sartre, Julia Cagé, Sauver les médias, Société de médias à but non lucratif, Thomas Piketty
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