La Loire Atlantique 5e roue de la Bretagne ?
800e chronique du blog, débuté en 2005
Cette article a été publié par le Conseil de développement de Nantes Métropole, par L'Hebdo Sèvre et Maine le 19 juin 2014 et dans La Croix le 7 juillet 2014
Ma contribution au débat sur la réforme des régions ( transmise ce jour au Conseil de développement Nantes Métropole)
Cette article a été publié par le Conseil de développement de Nantes Métropole, par L'Hebdo Sèvre et Maine le 19 juin 2014 et dans La Croix le 7 juillet 2014
Ma contribution au débat sur la réforme des régions ( transmise ce jour au Conseil de développement Nantes Métropole)
Dans le grand débat de la réforme territoriale qui vient d’être lancé, l’affaire
serait entendue : la Loire Atlantique demanderait son rattachement à la
Bretagne, afin de reconstituer la Bretagne historique, et mettre fin à 50 ans
d’anomalie administrative et politique. Déjà, en 2009, quand la question avait
été évoquée dans le cadre du comité Balladur pour la réforme des collectivités
territoriales, l’ancien président de la République s’en était fait l’écho, et, un peu à la Ponce Pilate, avait
laissé entendre qu’il laisserait faire. Depuis, le grand amplificateur
médiatique et la forte mobilisation des militants de la cause bretonne, qui ne manque ni de forces ni
de talents, donnent le sentiment que dans la phase propice qui s’engage, il faut passer à l’acte. L’acte de décès des Pays
de la Loire.
Pour ce faire, les avantages que la Loire Atlantique retirerait de son
rattachement à la Bretagne - comme le dernier wagon resté à quai - sont
peu développés. En revanche, le procès fait au Pays de la Loire est sans
appel : mosaïque informe, fille de Pétain, habitée de « ligériens »
- appellation péjorative ! - sans Histoire, ni culture commune, et autres
appréciations définitives.
Alors que l’air du temps est à la valorisation du métissage et de la
diversité, reconnaissons au moins que les Pays de la Loire constituent un bel
exemple d’enrichissement mutuel. L’histoire, les paysages, les territoires de
vie, rapprochent les hommes et les départements de cette région.
Jules César le premier a détaché le Sud Loire pour le rattacher au
Poitou, faisant de la Loire une frontière naturelle qui a perduré pendant
presque 9 siècles. En suivant la Loire, faut-il rappeler le passé prestigieux
du Maine et de l’Anjou bien symbolisé par l’Abbaye de Fontevrault. De la
Hongrie à Jérusalem, de l’Angleterre au royaume de Sicile, « L’Europe des Anjou » a
marqué l’histoire du XIIème au XVème siècle. Comment aussi ne pas évoquer le passé douloureux du sud de la région de 1793 à 1796, avec la Vendée
au sens large englobant le pays nantais, qui a payé lourdement sa rébellion
contre un pouvoir qui la méprisait. Les Vendéens dans leur errance du Mans à
Savenay, ont sillonné cette région, et lui ont aussi donné des éléments
d’identité.
Les paysages et leur lumière si particulière, les cultures avec les Vins
de Loire, de Saumur à Clisson et au pays de Retz, constituent des éléments et des
appellations ayant une forte identité. Les
cultures maraîchères qui suivent le fleuve : autant de marques de qualité
connues bien au-delà de nos frontières. Faut-il appeler à la barre de ce
procès, Julien Gracq ligérien célèbre qui écrivait « Quand on va du
nord au sud de la Loire, bien qu’on reste dans la région du schiste et du
bocage, on change en réalité de pays…et même de manière villageoise de vivre et
de philosopher ». Dans son Dictionnaire
amoureux de la Loire parue
récemment, l’académicienne – et angevine – Danièle Sallenave montre le lien
fort et contrasté que constitue le fleuve dans une diversité insuffisamment
soulignée « C’est dommage. Il y a un avant, sauvage quand elle [La
Loire] creuse son chemin, et un après en pays nantais » (P.O. 8 mai 2014). Ce contraste est bien
aussi celui de la Loire Atlantique, si bien nommée, avec ses ardoises au nord
et ses tuiles au sud.
Comment ne pas voir enfin le
spectaculaire rapprochement des territoires de vie des habitants de cette
région, avec les aires urbaines de Nantes, La Roche sur Yon, Cholet, Ancenis,
Angers, toujours plus proches. Ce sont autant d’échanges, de projets communs, de
migrations quotidiennes, qui avec l’attirance des Mayennais et Sarthois pour
nos côtes, ont constitué un vrai territoire économique social et culturel. Nantes
s’y inscrit naturellement comme pôle central et l’hôtel de région au milieu du
fleuve tourné vers l’est, symbolise bien la dimension ligérienne, multipolaire.
Comment imaginer la Loire Atlantique rompant tous ces liens et tournant définitivement
le dos à la Loire ?
Alors ne jetons pas la région
des Pays de la Loire avec l’eau du fleuve. Gardons ce que l’histoire récente a
façonné et enrichi. Et s’il faut trouver de nouvelles dimensions pour nos
régions, nous avons davantage à gagner dans le dépassement pour constituer un
ensemble plus vaste. La Bretagne, les Pays de la Loire, et pourquoi pas le Poitou Charente, en mettant en commun ce
qu’elles ont de meilleur, constitueraient un territoire tourné vers l’avenir,
alliant dynamisme économique, démographique et culturel. Chacun pourrait y
garder son identité et assurer son développement sans repli ni crispation.
Libellés : Bretagne historique, Danièle Sallenave, Julien Gracq, L'Europe des Anjou, réforme territoriale, Région Pays de la Loire, Vendée
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